Le temps de la réconciliation : un temps à ne pas manquer



Jean Delumeau


«  Les résistances à l’oecuménisme viennent, je le répète, de plusieurs côtés à la fois. Mais le catholicisme étant la plus grande étoile de la constellation chrétienne, il lui appartient, me semble-il-, de prendre les initiatives majeures en faveur de la réunion. Or, un obstacle se dresse ici. Car, pour entrer dans une concertation fructueuse avec les autres professions chrétiennes, il est nécessaire que l’Eglise romaine ait auparavant instauré à l’intérieur d’elle-même des espaces de dialogue et modifié ses structures de manière à créer de véritables échanges avec ses propres fidèles ; autrement dit qu’elle accepte et institue d’abord une pluralité catholique pour mettre ensuite sur pied une pluralité chrétienne.
Il faut encore élargir le propos : non seulement la création des structures associant les fidèles aux décisions du magistère catholique, mais aussi une plus grande collégialité au niveau supérieur de la hiérarchie et une plus large autonomie des Eglises locales, avec effacement corrélatif de la Curie, constituent des préalables indispensables au dialogue oecuménique. Car celui-ci bute d’abord et surtout sur le centralisme romain et l’énorme pouvoiur du pape, «  le curé du monde », dit-on parfois, que n’équilibre aucun contrepoids.( pp. 179-180 )
L’avenir du christianisme passe par l’intégration du pluriel, c’est-à-dire par l’acceptation fraternelle des confessions chrétiennes les unes par les autres et l’acceptation non moins nécessaire, dans la charité réciproque, de la diversité à l’intérieur de chacune des composantes du christianisme. » (p. 189)

Extrait de Jean Delumeau " Guetter l’aurore. Un christianisme pour demain ", Paris, Editions Grasset et Fasquelle, 2003.


En ce début de millénaire l’oecuménisme semble faire du surplace par rapport aux espoirs qu’avait fait naître le dernier concile Vatican II. Le manque d’avancées dans le dialogue religieux apparaît flagrant relativement à la nécessité de l’oecuménisme. S’il n’est pas question de négliger la difficulté des problèmes à aborder, il n’en reste pas moins que la division des Eglises ne peut qu’affaiblir la crédibilité du christianisme dans l’esprit des non croyants. Si l’Eglise peut se définir comme une communion d’amour nos contemporains, et les plus jeunes d’entre eux, ne sont-ils pas en droit d’attendre une marche vers la réconciliation fraternelle - même si elle doit être longue et les obstacles nombreux à surmonter - entre les différentes confessions chrétiennes ? Ne serait-ce pas là une condition pour que le message d’Amour soit plus lisible et plus crédible dans le monde sécularisé contemporain. La voie, à terme, est sans doute dans l’acceptation de la diversité là où les fondamentaux du mystère chrétien ne sont pas en cause.