Des pierres et des hommes
à l'époque romane
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C'est la beauté de la pierre métamorphosée par la main de l'artiste qui retient aujourd'hui l'attention contemporaine. Cependant, au-delà de sa seule dimension plastique, la mémoire des pierres exprime plus profondément comment une partie de l'humanité s'est un temps définie avec ses problèmes, sa façon de voir et ses tentatives de se perfectionner elle-même ainsi que le monde dans lequel elle se situait.
C'est dire que ce monde des pierres médiévales est aussi une histoire d'hommes. Une histoire des gens vivant dans un temps et dans une société définis. Bien sûr seules les recherches érudites des historiens et des archéologues peuvent nous dévoiler véritablement le cadre de vie des hommes d'un autre temps. Toutefois, à notre modeste niveau d'initiation du regard, la mémoire des pierres romanes peut-elle contribuer à une première connaissance des hommes et de leurs conditions d'existence ?
Si le patrimoine roman dispense une leçon au peuple chrétien sous forme d'un grand livre d'images de pierre, dans quelle mesure ces mêmes pierres, métamorphosées par la main de l'artiste, peuvent-elles nous renseigner sur les conditions de vie des gens des XI-XIIe siècles pour qui elles ont été sculptées ?
On peut penser que ces images explicitement religieuses ou à connotation symbolique révèlent aussi, de manière sous-jacente, certains aspects de l'ordre social.
Mais l'enquête montre aussi qu'il n'est pas possible, à partir des seules pierres sculptées, de reconstituer de façon satisfaisante la quotidienneté vécue par les femmes et les hommes de ce temps. En conséquence, notre parcours imagé, pour utile qu'il demeure, ne peut déboucher que sur une connaissance fragmentaire ou allusive...
Par suite, cette nouvelle balade imagée dans les pierres romanes entend seulement ouvrir des chemins pour guider les pas et le regard vers les gens et leurs conditions d'existence tels que les joyaux les plus célèbres ou les édifices méconnus peuvent nous les donner à voir encore aujourd'hui.
- Extrêmement structurée, selon une hiérarchie estimée d'origine divine, la société médiévale se présente comme fortement codée. Elle s'organise autour de trois groupes inégaux : ceux qui prient, ceux qui se battent et ceux qui travaillent. Vouloir tenter de saisir, autant que faire se peut, la vie quotidienne des gens suppose de repérer, à la suite des artistes romans, les signes distinctifs du rang social, les attributs définissant la fonction, les instruments et les gestes caractéristiques de l'activité pratiquée. La hiérarchisation et la différenciation subséquente contribuent au maintien de chaque individu à la place que l'appartenance à son groupe lui assigne dans l'ensemble social. La quotidienneté vécue transcrite dans la pierre laisse ainsi transparaître un clivage entre les dépendants pauvres et les riches et puissants de ce monde ; toutefois il faut encore redire qu'au-delà du poids des conventions l' inventivité figurative des imagiers est telle que le réalisme des représentations de la vie quotidienne ne peut qu'en être affecté. . .
L'aperçu des réalités quotidiennes vécues par les gens des XI-XIIe siècles glanées çà et là s'organisera autour des thèmes suivants :
- Images de la femme et de l'homme
- Statuts sociaux
- Aimer, enfanter, mourir
- Activités humaines du temps
- Tables médiévales
- Divertissements
- Déplacements