LES ETAPES ULTIMES DE LA SPIRITUALISATION
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Dans la sculpture romane les " acrobates " sont en nombre et représentent la phase supérieure de la progression spirituelle.
Il semble que dans l'esprit des imagiers on puisse formuler l'hypothèse qu'il s'agit de figurer la conversion intérieure, c'est-à-dire le nouvel équilibre apporté par le dépassement de soi, par une maîtrise plus grande de la part animale de l'homme afin de faire plus de place à la part spirituelle.
La figure acrobatique tend à évoquer l'impulsion vers une autre condition plus favorable, en bref plus propice à gravir les échelons de la voie du salut.
Dans l'imagerie romane le retournement est la gymnastique que chaque homme devrait réaliser et qui consiste à diriger vers le haut tout son être ; il s'agit d'amener les parties corporelles les plus liées à la matière au même niveau que l'esprit.
Les tailleurs ont représenté cette démarche par des acrobates et contorsionnistes qui orientent leurs membres inférieurs vers le haut . Il s'agit par là d'une démarche en vue d'accéder à un état supérieur à sa condition antérieure, normale, ordinaire. Dans l'art roman l'ultime étape de la spiritualisation est le retournement ou la conversion lorsque les hommes tournent une partie de leur corps vers le ciel.

LE DEPASSEMENT DE SOI


Eglise de Rioux, Charente-Maritime.
Simple exercice de contorsionnisme ou dans cette entreprise délicate de projection en l'air
de la partie basse de son corps ou plutôt, au second degré, un effort pour changer radicalement.
une tentative de " retournement intérieur " ?


Eglise Saint-Hilaire de Melle, Deux-Sèvres. Acrobate de place publique ou variante du thème du retournement ? Ne faut-il pas chercher à emmener tout son être vers le haut c'est-à-dire s'efforcer de changer radicalement : un essai de totale conversion ?


Ancienne abbatiale Saint-Pierre , Airvault, Deux-Sèvres.
Une évocation du thème du retournement.
Cette sculpture montre qu'il faut toujours éviter devant une image
de n'en voir que l'apparence ; l'imagier se sert des positions des personnages
pour signifier leurs dispositions intérieures. Au lieu de voir dans cette sculpture
une image de mauvais goût, sans doute faut-il y voir plutôt une démarche de retournement :
l' homme en voie de se libérer du poids de ses passions, en d'autres termes, en train de se libérer de son animalité.


Eglise d'Aulnay-de-Saintonge, Charente-Maritime.
Entreprise de conversion de l'homme qui décide de prendre le spirituel davantage en considération ; accordant moins d'importance au matériel, il modifie son comportement et tend à se transformer.


Crypte de Saint-Parizé-le-Châtel, Nièvre.
Sous les yeux de la chouette un homme effectue une tentative de conversion après un changement de perspective comportementale...


Eglise de Chateauneuf-sur-Charente, Charente.
Un homme contorsionné les pieds sur la tête ; il essaie de changer du tout au tout..


Eglise de Salignac-de-Mirambeau, Charente-Maritime.
Le talent de l'imagier fait seul la différence entre ces diverses représentations illustrant la même idée.



Eglise de Nieul-les-Saintes, Charente-Maritime.

Composition scénique représentant une transformation intégrale de l'homme qui a réalisé son retournement puisque la partie inférieure du corps est passée au-dessus de la tête.


Eglise de Villiers-sous-Chizé, Deux-Sèvres.
Un acrobate marche sur les mains accompagné par un joueur de vièle à archet assis. Faut-il voir plus loin qu'une scène de baladins, d'ailleurs fréquemment rencontrée dans la sculpture romane ?
Envoûté par la musique le pécheur aurait-il perdu son aplomb ? Dans une autre optique on pourrait être en présence d'une totale transformation de l'homme ( ce serait le même être qui serait représenté ) ; le retournement représente un changement radical.


Eglise Saint-Hilaire, Melle, Deux-Sèvres.

La même scène est ici retrouvée : une danseuse, les pieds sur le tailloir et le buste à la renverse, est accompagnée par deux musiciens assis. " Cul-par-dessus tête " le personnage est inversé ; il est incapable de maîtriser son être. A-t-il perdu tout ce que représente la station droite ? Ou, dans une autre lecture, ayant accompli son retournement le personnage progresserait dans sa transformation spirituelle évoquée par l'aptitude à maîtriser ici un instrument à corde.


L'ACCES AU DEGRE SUPERIEUR COMMUNAUTAIRE
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Se dépasser, s'aider les uns les autres, former une chaîne humaine autant de messages que des imagiers ont romans ont pu représenter dans la pierre.


Eglise de Thuret, Puy-de-Dôme.
Un homme, prenant appui sur le sol semble soutenir l'édifice ; un petit personnage s'agrippe à son bras.
Sans doute, faut-il voir là de la part de l'imagier une évocation du rôle de soutien de l'Eglise
que tout fidèle, si modeste que soit son rôle, est amené à tenir.`


Eglise Saint-Nicolas de Maillezais, Vendée.

Au portail, des " atlantes ", juchés sur les épaules les uns des autres, montent vers le ciel. Sans doute est-il plus judicieux de voir dans cette pyramide humaine l'importance du rôle joué par chaque élément ; si l'un fléchit le tout s'effondre. En d'autres termes, quel que soit son rang chacun a son importance. dans une communauté.


Eglise Sainte-Radegonde, Talmont-sur-Gironde, Charente-Maritime.
Une variante de la représentation de l'échelle ; chaque homme a un rôle à jouer.


Eglise de `Limalonges, Deux-Sèvres.
Curieuse sculpture d'hommes se tenant les uns les autres par leurs bras et paraissant suivre le premier tourné vers l'intérieur.
Ne faut-il pas voir, au-delà caractère fruste de la sculpture, une évocation de la chaîne humaine
formée par les membres d'une même communauté travaillant ensemble au bien de tous ?
Chaque maillon de la chaîne, en la personne de chaque homme, est nécessaire à la solidité de l'ensemble.



Eglise Notre-Dame de Mailhat, commune de Lamontgie, Puy-de-Dôme.
Un des chapiteaux du portail sud comporte plusieurs personnages unis par un lien. Ne faut-il pas aller au-delà de l'aspecr rudimentaire des traits pour s'attarder au regard de ces hommes et au groupe qu'ils constituent ?