IMAGES ROMANES DES ANGES
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Ange accompagnant la Vierge à l'Enfant. Façade de la cathédrale de Zamora, Espagne.
☞ Vous avez dit : anges ?
Le monde imagé dans lequel les anges nous invitent à entrer est pour l'homme du XXIe siècle un monde qui lui est devenu fort étranger. Compte tenu de la culture scientifique et technique contemporaine on mesure difficilement la vigueur des débats entre penseurs médiévaux qu'ont suscité les constructions spéculatives sur le monde des anges, les discussions relatives à leur langage, à leur liberté, voire à leur sexe.
Aujourd'hui, l'ange est devenu une simple image, voire un objet ornemental dans le cas des figurations d'angelots. Le mot ange et ses expressions associées font partie du vocabulaire courant : être le bon ou le mauvais ange de quelqu'un, être aux anges, rire aux anges, avoir une patience d'ange, être un ange, être un ange de bonté, de vertu, un ange passe... Ces différentes acceptions montrent que le terme d'ange, utilisé par analogie, continue à faire recette dans le langage contemporain, mais ces formulations profanes nous éloignent de la signification théologique du vocable ange.
Eglise de Benet, Vendée
La vie de l'homme roman, à la différence de la nôtre, était en lien étroit avec ces compagnons de route qu'étaient les anges. On sait que le patrimoine bâti roman ne peut être pleinement saisi qu'en rapport avec l'esprit du temps. La sensibilité croyante d'une époque de foi traverse à n'en pas douter les pierres romanes même si la pratique religieuse n'était peut-être pas toujours ce que l'on croit qu'elle fût. C'est ainsi qu'il est loisible de penser qu'à l'époque médiévale la vie des gens ne se déroule pas dans l'ignorance du monde des anges. C'est tout normalement que les anges trouvent leur place dans l'iconographie romane.
Ange de la mise au tombeau du Christ, église Saint-Pierre de Melle, Deux-Sèvres.
L'imagerie angélique se situe au confluent des croyances et de la piété populaire. Cultivé, l'homme roman est imprégné de littérature mystique évoquant l'univers angélique. Illettré, en levant la tête, il découvre la présence de l'ange sur la pierre sculptée des tympans, portails et chapiteaux. A l'issue de sa rencontre avec l'ange l'homme roman est convié à ne pas rester les pieds rivés à la glèbe mais à élever son coeur vers la patrie céleste. Faut-il rappeler que l'enjeu de la vie humaine dans l'espace spirituel roman implique de partir du présupposé que le cheminement vers le monde d'en haut ne peut se faire sans une lutte incessante contre la tentation et les oeuvres de Satan. Ami de Dieu l'ange est en mesure de montrer à l'homme la voie vers le bonheur éternel.
Naturellement l'ange relève de l'indicible que les seuls sens extérieurs ne peuvent permettre d'atteindre et d'exprimer. Dans l'église romane l'ange apparaît occuper une fonction intermédiaire entre la divinité et les hommes. Ses appellations multiples ( séraphins, chérubins, archanges, anges...) sont en lien étroit avec la pluralité de ses fonctions. Les uns se tiennent à proximité de l'Etre divin qu'ils glorifient par leurs chants de louange. Les autres accompagnent plus spécifiquement l'homme et jouent un rôle de passeurs entre ciel et terre. En bref, selon la catégorie à laquelle ils appartiennent, les anges sont plus près de la divinité ou plus proches des hommes. Séraphins et chérubins en contact étroit avec la divine Lumière se placent ainsi au-dessus des anges messagers. A la différence des démons ricanants et grimaçants, tentateurs rusés et multiformes qui se vouent aux activités maléfiques et tendent des pièges aux pauvres humains, les anges remplis de douceur tendent les mains aux hommes qu'ils cherchent à édifier par les messages de lumière qu'ils leur apportent. C'est en ce sens que l'ange peut être considéré comme un entremetteur entre le monde d'en haut et celui d'en bas.
Dans l'évocation du paradis chrétien on a vu dans notre site sur le paradis qu'il fallait prendre appui notamment sur deux textes fondateurs : le livre de la Genèse pour le jardin d'Eden et les écrits apocalyptiques pour la Jérusalem céleste ; pour faire une place explicite aux anges il faut ajouter un autre document : la Hiérarchie céleste.
Cet ouvrage, attribué à Denys l'Aréopagite - que l'on appelle plutôt aujourd'hui le Pseudo-Denys - a fait autorité à l'époque médiévale. La hiérarchie angélique établie à la fin du Ve siècle ou au début du VIe par ce néo-platonicien converti au christianisme se diffusa durablement dans les écrits des visionnaires et dans l'iconographie.
☞ C'est ainsi qu'à la fin du XIIe siècle une planche du fameux manuscrit d' Herrade de Landsberg évoque la communauté céleste en se référant à la hiérarchisation proposée par le Pseudo-Denys ; une relation étroite est opérée entre les divers esprits célestes et les catégories de justes accédant au jardin de la vie éternelle.
Extrait du manuscrit d'Herrade de Landsberg
☞ De la même façon, l'époque bâtissant, sculptant et peignant largement en vue du ciel les artistes disposant du pouvoir d'insuffler l'esprit à la matière brute en la transfigurant par le maillet et le ciseau représenteront le monde angélique tant dans des scènes de l'Ancien que du Nouveau Testament où il apparaît toujours au service de Dieu.
L'ange emmenant Habacuc vers Daniel dans la fosse aux lions.
Eglise d'Ydes-Bourg, Cantal.
L'ange de la résurrection indique à une sainte femme le tombeau vide
.Eglise Saint-Pierre, Mozac, Puy-de-Dôme.
Dans des attitudes, des situations variées et des fonctions déterminées les créatures spirituelles que sont les anges sont constamment présentes dans l'imagerie romane. A mesure que la Nouvelle Alliance se précise et se substitue à l'Ancienne le rôle des anges se transforme progressivement ; de messager de la révélation il devient le guide des fidèles et de l'Eglise lorsque la révélation se trouve fondamentalement accomplie en Christ.
Le retour du Christ. Etres spirituels jouant de la trompette encadrent le Maître du Jugement dernier.
Façade de l'église de Saint-Jouin-de-Marnes, Deux-Sèvres.
Eglise Santa Maria de Quintanilla de las Vinas, Espagne.
SOMMAIRE
Le monde céleste : anges de lumière, serviteurs de Dieu et entremetteurs
Les anges, messagers et médiateurs de l'Ancienne alliance
Les anges, annonciateurs du salut réalisé en Christ
Les anges, transmetteurs des révélations divines ( Apocalypse ) et exécuteurs des jugements de Dieu
Les anges adorateurs, accueillant et conduisant les élus vers la Jérusalem céleste
NB
Ayant traité du monde maléfique dans l'art roman sur un autre site, nous n'accorderons pas de place ici aux figurations romanes d'anges rebelles qui se sont révoltés contre Dieu et sont devenus les démons ( Voir la référence dans la page repères ).
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