LES INTERROGATIONS PREMIERES





Depuis ses origines, l'aventure humaine est l'histoire de l'homme qui, à partir d'une première élaboration d'outils, crée progressivement
un équipement artificiel dont les formes se complexifient de façon accélérée au cours du temps et qui aboutissent à de profonds
changements du monde extérieur. Cette transformation du monde ne s'est d'ailleurs jamais effectuée indépendamment des caractéristiques sociétales générales d'ordre économique, social, politique, idéologique, artistique et religieux.

L'histoire des hommes, depuis qu'ils existent, est marquée par l'accroissement de leurs connaissances, l 'extension de leurs pouvoirs,
l'aménagement de leurs territoires, la création artistique, la construction de lieux de culte. Rivés à la matière qu'ils dominent de plus en plus grâce à leur intelligence, ils proclament qu'ils sont maîtres de leurs destins et n'attendent pas grand chose de l'au-delà de ce qui se donne à voir.



Le monde est devenu moins opaque à l'homme moderne fier de son intelligence et de sa rationalité. Les connaissances qu'ils ont acquises et les outils qu'ils se sont forgés permettent aux hommes d'aujourd'hui de tenter une aventure tous azimuts sans équivalent dans leur histoire. Ils ont reporté sur les promesses de la technoscience les espérances qu'ils mettaient hier dans la religion, la politique et l'Histoire.
Jadis, les hommes attendaient tout du ciel ; puis, les hommes d'Occident ont escompté le bonheur sur la terre par la voie politique.
L'avènement d'un monde économique et politique meilleur se faisant de plus en plus attendre, c'est vers la voie de la science que se reportent, à l'entrée du XXIe siècle, les espérances humaines.

L'orgueil des hommes s'amplifie au fur et à mesure des avancées scientifiques et techniques, mais simultanément il est contrebalancé par un sentiment d'humilité qui prend sa source dans la perception de la modestie de ses origines dans la savane africaine. L'univers les préoccupe ; ils souhaiteraient par la science l'appréhender et le maîtriser. Chaque jour les hommes essaient de percer davantage le secret des mécanismes de l'univers en s'en remettant à la science, rejetant l'hypothèse du Grand Horloger ordonnateur, souverain du monde et des sociétés couramment avancée en d'autres temps.

Pendant longtemps le monde a été plein de dieux. Les hommes ne mettent plus globalement leur espérance en Dieu ; ont-ils fini de rechercher le passage vers une autre vie, recherche qui orientait naguère l'existence des hommes qui les ont précédés ?

Toutefois, le sens profond de l'aventure humaine demeure toujours aussi énigmatique ; les hommes n'ont pas fini de chercher la clé du mystère. L'évolution vers une complexité croissante unit l'univers, la vie et l'homme qui ne cesse de s'interroger pour savoir d'où il vient ?
Tout émus qu'ils soient par un coucher de soleil sur l'océan ou émerveillés la nuit devant un ciel scintillant d'étoiles que font les hommes sur la planète Terre ? Qu'est-ce que la vie ? Quelle est la bonne façon de vivre ? Qu'est-ce que la mort ? Qu'est-ce qu'il y a de l'autre côté ? Rien du tout ou une autre vie ? La mort est-elle la fin absolue, le cap sur le néant ? Y a-t-il un au-delà des apparences objectives de la réalité humaine ? Si oui, est-elle un passage vers un au-delà d'ici bas ? Sont-ils seuls au monde ?

Après l'éclipse des religions révélées, après l'émergence et l'effacement du messianisme de statut terrestre qu'était le marxisme, et
compte tenu des avancées de la technoscience, la vieille question du sens de l'existence ne trouve plus vraiment d'espace où s'exposer globalement.
Aujourd'hui, c'est en eux-mêmes que les hommes mettent leur confiance, possédant une autonomie suffisamment marquée pour prendre
leur distance vis-à-vis de Dieu et jouissant d'un degré de liberté suffisant pour ne pas être à l'abri d'un risque de destruction de l'humanité ou
de défiguration du monde du fait de leurs propres oeuvres.

Cependant, devant les peurs liées à la finitude humaine, devant la question du mal qui ne cesse de les interpeller, certains, pour le moins s'interrogent.



Sur le plan de la philosophie de la vie, il y a ceux qui pensent que les hommes sont seuls au monde et que la vie n'a pas de sens. Seuls devant l'absurdité du monde, le sens de leur vie ne peut alors provenir que de leurs seuls actes en s'en tenant au seul horizon du monde et à l'exercice de la seule raison.

Par rapport à ceux qui ne croient qu'aux hommes, il y a ceux qui demeurent convaincus, grâce à la foi, qu'il ya un Tout Autre, supérieur au monde, et qui attend les hommes au bout de leur cheminement terrestre.

D'un côté, absurdité de la condition humaine ? De l'autre, sortie de l'ombre pour aller à la rencontre de la Lumière, notamment dans l'espérance chrétienne, sur la base d'un projet divin organisant la vie dans la perspective d'un en-avant ?
Ainsi, le message du Christ est-il désuet, comme il sied à beaucoup de le penser, ou est-il un message de vie d'une actualité toujours aussi brûlante, une proposition de sens qui débouche sur un ailleurs ?
Le fait de croire ou de ne pas croire fait partie des libertés humaines ; à chacune, à chacun de se situer. Il est en tout cas difficile d'échapper
au questionnement. Dans un sondage réalisé pour
Le Monde des religions de janvier 2007, 51 % des Français se reconnaissent catholiques. Les résultats de cette nouvelle enquête s'inscrivent dans une évolution tendancielle de ces dernières décennies, celle du reflux des valeurs religieuses institutionnalisées. Pour le sujet moderne, la religion - chrétienne ou autre d'ailleurs - n'interfère plus avec les diverses dimensions économiques, politiques, sociales, familiales ou éthiques de la vie. Qu'on le déplore ou non, une coupure tend à
s'opérer toujours un peu plus entre sphère privée et sphère publique. La subjectivité de l'individu tend à l'emporter sur les dogmes et les valeurs institutionnalisées. C'est à des phénomènes de destructuration/restructuration des croyances religieuses que nous assistons ; sujets et magistères sont confrontés à des questions majeures.

Compte tenu du fait que les croyances sont de moins en moins collectivement partagées et compte tenu de la multiplicité contemporaine
des émetteurs de sens, les hommes du XXIe siècle devront construire leur vie, non plus dans une société institutionnellement chrétienne,
mais dans un contexte athée et religieux multiforme.

Ce n'est pas avant la fin des temps que le mystère du monde sera définitivement éclairci ...
_______

Dernières clés de lecture

D'Ormesson Jean - La Création du monde, Paris, Robert Laffont, 2006.
Donegani Jean-Marie - L'Eglise sera vaincue par le libéralisme, Le Monde, 21-22 janvier 2007.

Sur le Net les sites suivants de l'auteur abordent ces questions et fournissent des repères bibliographiques :

* L'homme face à la mort.
La condition humaine : 'homme au soir de l'existence lorsqu'il lui faut tout quitter.

Cliquez ci-dessous :
http://jalladeauj.fr/mort/index.html


* Croire à l'entrée du XXIe siècle.
Le champ religieux dans un monde en mouvement. Fin ou retour du religieux ?

Cliquez ci-dessous :
http://jalladeauj.fr/croire/index.html


_____________