Les chevaliers
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Marie-Thérèse Camus et Elisabeth Carpentier ( 2009 ) rappellent que le combattant type de la fin du XI et du XIIe siècles est le combattant à cheval, la charge à la lance étant le mode de combat privilégié.
Le chevalier dispose d'un double équipement offensif et défensif.
Ses armes offensives sont la lance et l'épée. ; en d'autres termes ce sont des armes de contact.
La
lance, formée d'une hampe de bois terminée par un losange de fer, a longtemps était légère, et employée comme arme de jet ; elle pouvait aussi, maniée de haut en bas par un cavalier, servir à percer l'armure d'un ennemi à pied.
A la fin du XIe siècle la lance s'allonge et s'alourdit pour devenir une arme de choc destinée à renverser l'adversaire. La lance, munie ou non d'ailerons est l'instrument privilégié des charges de cavalerie. Des pennons décorée sont parfois accrochés à sa hampe.
Tenue sous l'aisselle, elle est maniée par des cavaliers, solides sur leur monture grâce au perfectionnement des selles et des étriers.
En effet, l'usage du cheval de guerre implique un certain nombre d'aménagements permettant au cavalier de résister au corps-à -corps : étriers et étrivières placés très en avant de la selle, allongement de la pointe des éperons, selles aux extrémités (arçons) plus hautes.

Quelle que soit l'importance de la lance,
l'épée reste le symbole de la chevalerie. Elle est l'arme la plus personnelle du combattant. L'épée était portée à gauche pour être tirée de la main droite dans un fourreau fixé au ceinturon ou au baudrier en cuir. Il en existe différentes variantes. Le glaive est court ; la lame pointue à double tranchant de la grande épée est utilisée pour frapper d'estoc et de taille.

L'épée et son baudrier constituent des objets très symboliques, en particulier lors de la cérémonie de remise solennelle des armes à l'âge adulte, lors de l'adoubement du chevalier ou lorsqu'un combattant âgé dépose son baudrier sur l'autel de l'église où il se fait moine.

De plus, dire que le chevalier combat à cheval peut paraître allant de soi, mais en réalité cela a de l'importance car un cheval - " meilleure conquête " de l'homme- coûte cher et constitue de ce fait une marque de richesse, de prestige, de supériorité
Les chevaux font l'objet d'un commerce à longue distance, de cadeaux diplomatiques et d'expéditions de pillages. On distingue le cheval de guerre (destrier) du palefroi, destiné au voyage et à la chasse, et du roncin, cheval à tout faire de moindre valeur. Les meilleurs destriers peuvent coûter le prix d'une exploitation agricole rappelle Luc Bourgeois. ( 2011 )
Il y a une complicité étroite entre la monture et le cavalier lors des charges à la lance, le duel à l'arme au poing, l'encerclement de l'adversaire, la bousculade, la dérobade.


L'équipement défensif
Le corps du cavalier est protégé par un haubert métallique. Il s'agit longtemps de la broigne, un vêtement de tissu ou de cuir sur lequel sont fixés des renforts rigides appelés macles sous forme d'écailles de fer.
Le haubert de mailles constitué d'anneaux de fer se diffuse progressivement. La différence entre une broigne et une cotte de mailles est que dans cette dernière les mailles sont reliées entre elles sans support intermédiaire. Les mailles sont doublées ou triplées aux endroits les plus vulnérables.
Le haubert protège la tête par un capuchon, sur lequel prend place un casque conique muni d'une plaque protégeant le nez, le nasal. Les chausses sont réalisées en anneaux de fils métalliques entrelacés.

Lors des combats, la cotte de mailles était surtout efficace contre les frappes de tranche mais laissait le corps vulnérable face aux coups d’estoc ou à l’écrasement de la masse. En effet, la maille évitait le danger du tranchant de la lame mais aucunement la commotion qui pouvait être occasionnée par le choc.

Cette défense est complétée par le port de bouclier dont il existe deux types. D'abord les boucliers sont petits, ronds et bombés, en cuir bouilli monté sur une armature de bois, muni au centre d'une pointe qui assurait la solidité de l'ensemble.
Au XIIe siècle ce type de bouclier recule devant le succès de
l'écu et tend à devenir le propre du fantassin.
L'écu a une forme en amande, légèrement arrondie dans sa partie supérieure, en pointe dans sa partie inférieure. L'écu, de taille variable, est en général beaucoup plus grand que le bouclier rond.


** Cavaliers, montures et armes



Un personnage armé marche à côté de sa monture tenant d'une main un bouclier et de l'autre une lance à l'extrémité de laquelle pend un baluchon.
Ancienne abbatiale, Airvault, Deux-Sèvres.




Cavalier à la lance.
Eglise de Biron, Charente-Maritime.


Ancienne abbatiale d'Airvault, Deux-Sèvres.

Une femme debout les mains croisées représente l'Eglise ; un cavalier avec un écu transperce de sa lance un dragon dont on perçoit sur la gauche de la corbeille les anneaux. Evocation du combat que le chrétien doit effectuer en permanence contre le mal ? La victoire sur le dragon évoquerait alors sa conversion réussie, le retournement victorieux de l'homme qui aurait maîtrisé son propre dragon intérieur en d'autres termes, ses passions. Un cavalier, ayant bien en main les rênes de sa monture, et armé d'une lance est protégé par un écu. La pointe de sa lance pénètre dans le corps d'un dragon dont on aperçoit les anneaux sur la gauche du chapiteau. A côté du personnage qui essaie d'exterminer le dragon on note la présence d'une femme qui semble ne rien faire… Ne faut-il pas à chacun essayer de vaincre son propre dragon intérieur ?




Chevauchée de deux cavaliers.
Eglise de Gargilesse, Indre.


Quelle est la signification exacte de cette évocation cavalière ?
Eglise de Gargilesse, Indre.


Frise nord. Un cavalier avec un bouclier.
Eglise de Saint-Restitut, Drôme.



Sur un écoinçon du tympan du jugement dernier un guerrier sans tête dont le cheval piétine un personnage couché sur le sol.
Eglise Santa Maria de la Real, Sangüesa, Navarre.



Sur un chapiteau du portail des cavaliers sont affrontés.
Ermitage du Christ de Catalan, Garinoain, Navarre.

** Scènes de bataille.





Deux chevaliers lance en avant s'élancent l'un vers l'autre avec toute la puissance de leur monture.
Remarquer le sexe en érection des destriers des combattants.
Frise sculptée de l'abbatiale d'Andlau Bas-Rhin.



Un chapiteau de la grande absidiole du bras nord montre un cavalier muni d'un écu combattant des fantassins armés d'épées.

Eglise Saint-Amant de Boixe, Charente.



Scène de combats entre chevaliers et animaux fantastiques.
Eglise Notre-Dame, Gardes-le-Pontaroux, Charente.




Un combat de chevaliers.
Crédit photo : https://www.tourisme-conques.fr/fr/conques/abbatiale#chapiteaux-romans-a-motifs-vegetaux




Une métope du portail représentant un combat de chevaliers équipés d'écus et lances côtoie un modillon figurant un homme d'armes habillé de pied en cap.
Eglise San Martin de Artaiz, Navarre.


Un chevalier chrétien portant une croix sur son bouclier poursuit un cavalier musulman barbu, coiffé d’un turban et armé d’un sabre courbe. Faut-il aller plus loin qu’un simple simple épisode de bataille et voir une évocation de la lutte du chrétien contre l’infidèle ? Chapiteau intérieur de l’église Saint-Georges de Faye-la-Vineuse, Indre-et-Loire.

** Variantes de combats légendaires


Relief évoquant la reprise de Saragosse par les chrétiens en 1118.
Le combat de l'archevêque batailleur Turpin, coiffé de sa mitre, contre le géant musulman Abîme muni de son bouclier rond.

Cathédrale Saint-Pierre, Angoulême, Charente.


La célèbre frise de la façade se poursuit par une seconde scène en deux épisodes. On appréciera l'exactitude du détail de l'armement et du costume ainsi que le sens du mouvement.
Cathédrale Saint-Pierre, Angoulême, Charente.



Détail : Roland couronné ( neveu de Charlemagne dans la Chanson ) blesse à mort de son glaive Marsile, le traître roi maure de Saragosse, celui qui avait d'abord appelé Charles à son secours, puis l'obligeant à la retraite au cours de laquelle son arrière-garde fut décimée en tombant dans un guet-apens.

Cathédrale Saint-Pierre, Angoulême, Charente.


Pourfendu par l'épée de Roland le cavalier maure blessé s’enfuit et finit par s’effondrer devant la porte de la ville ouverte. Les musulmans de Saragosse brisent leurs arcs de dépit; la petite figure d'idole située dans une niche au-dessus du rempart sera ensuite précipitée à bas de son socle. Cathédrale Saint-Pierre, Angoulême, Charente.



Chapiteau représentant le combat des chrétiens dont l'écu porte une croix contre les Maures au bouclier rond.


Le Palais Royal, en face de l'église San Pedro, Estella. Navarre.




Autre face du chapiteau : sur l'écu de Roland se brise la lance de Ferragut ; le chrétien en profite et attaque le maure au ventre. Un soldat s'écroule entre les deux chevaux. ; c'est en fait Ferragut qui est représenté désarçonné et donc vaincu.
A gauche de la scène un autre cavalier maure avec son bouclier rond.

Le Palais Royal, en face de l'église San Pedro, Estella. Navarre.




Sur une autre face du chapiteau le combat se continue à pied avec l'épée pour Roland et une massue pour Ferragut.

Le Palais Royal, en face de l'église San Pedro, Estella. Navarre.



Variante plus simple du combat légendaire de Roland et de Ferragut.
Eglise San Andres, Villamajor de Monjardin. Navarre.


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