Nord Portugal, route romane 1
Nord Portugal, route romane 1
  • * Janvier 2024 joël jalladeau Courriel 0

Nord Portugal, route romane 1

Eglise São Salvator de Souto


Petite église élevée vers la fin du XIIIe siècle. Elle est flanquée d'un clocher quadrangulaire et d'une sacristie bâtie latéralement.

La nef vue du sud.

Les diverses petites croix sur socles des toits en perspective.


Détail de la croix du pignon sur son socle sculpté.


Côté sud de l'édifice avec ses deux composantes rectangulaires.


Le côté sud de l'église conserve des vestiges décoratifs médiévaux.

Le monument possède des arcades importantes qui ont remplacé la corniche primitive sur modillons.
L'inscription se rapporte sans doute à la date de rénovation de l'édifice.


Volumineuses ces arcades sont finement décorées. Au-dessus un motif d'entrelacs sur ce qui reste des corniches peut encore être observé.


Elles sont ornées non seulement du côté extérieur…


… mais leur intrados est aussi orné.


Les effets décoratifs recherchés sont renforcés par l'emploi de modillons sophistiqués.



Certains modillons ressemblent même à des chapiteaux.

Les thèmes de ces modillons représentent soit

1° classiquement des animaux, des rouleaux, des atlantes, un monstre dévorant un personnage…








2° des évocations des vices et des représentations à caractère obscène.
La gula ( la gueule ); autrement dit, péché de chair, bonne chère et beuverie peuvent être mêlés. Le souci excessif du corps conduit à négliger la dimension spirituelle de l'homme.
A cet égard les individus aux comportements déviants - gloutonnerie, beuverie, luxure - servent dans l'imagerie romane de contre-modèles. De la bonne chère à la chair il n'y aurait qu'un pas vite franchi...; à trop accorder d'importance au corps l'homme risque d'oublier une dimension majeure de son existence.







Curieux modillon présentant notamment deux têtes renfrognées s'opposant : est-ce une évocation de l'expression "tourner le dos à quelqu'un" par mépris ?


Des figurations masculines offrant leur intimité à la vue de tous



Des figurations féminines offrant leur intimité à la vue de tous




Le plaisir charnel sous toutes ses formes




Empruntant les traits plus ou moins réalistes de personnages ou/et d’animaux s’exhibant sans détour, se livrant à des attouchements ou à des étreintes charnelles la sculpture romane nous donne à voir quelques scènes contraires à la sexualité codifiée par les autorités religieuses commanditaires de l'édification de ces édifices voués au culte.

Art roman et rapports à la nudité : de l'image à la quête de sens.

Quel pouvait être le sens de ces sculptures évoquant de façon très apparente des sexes masculins ou féminins, des étreintes physiques Avec ces parties intimes de l'être humain explicitement dévoilées, on peut sembler très loin de la béatitude. Or, un édifice roman n'est-il pas d'abord un édifice sacré et ne devons-nous pas nous attendre à y trouver des représentations sculptées exprimant une perspective chrétienne du monde ?
Comme nous le rappelions ci-dessus on peut penser que les thèmes des sculptures sont d'ordinaire prescrits expressément par le commanditaire. Peut-être n’en est-il pas ainsi pour l’ensemble de la statuaire romane ? A côté des grands programmes iconographiques ou des motifs symboliques imposés des façades et des chapiteaux du sanctuaire ou des porches y-a-t-il des espaces de liberté moins soumis au contrôle strict du maître d’ouvrage ? Le sculpteur peut laisser davantage libre cours à son imagination, à ses préoccupations courantes, à la quotidienneté vécue ( activités laborieuses mais aussi festives, amour, objets...), au cadre de vie, animaux et végétaux.
Il est permis de penser que la statuaire romane est aussi pleinement le reflet d'une société et d'une époque. Ce qui nous vaut des scènes réalistes ou fabuleuses, pittoresques ou grotesques, terre à terre ou parfois à message, archaïques et naïves ou remarquables et d'une grande habileté selon le talent du tailleur de pierre.

C'est dans cette perspective générale qu'il convient sans doute d'appréhender les représentations réalistes des parties sexuelles des êtres humains qui peuvent paraître osées, crues, grivoises, érotiques, obscènes ; mais dans quelle mesure et à quel point l'étaient-elles pour les imagiers du Moyen Age ?

A priori il est loisible de penser que doivent paraître obscènes, luxurieux les comportements jugés répréhensibles par l’éthique dominante de l’époque telle que la révèle la littérature du temps. Or, les textes médiévaux sont pour une grande part l’oeuvre de religieux écrivant pour d’autres clercs formés pour avoir une défiance envers la gent féminine, la nudité des corps et les comportements sexuels. Dans ces conditions quel peut être le sens de ces images de pierre à caractère licencieux : dénonciation de la chair, source d’enseignement, figurations allégoriques, simple produit d’une culture populaire... ?

http://jalladeauj.fr/obscenite/
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