Pierre, l'homme à la clef
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Tête de l'apôtre provenant de la statue de saint Pierre qui ornait le tombeau de Saint Lazare
à la cathédrale d’Autun, Saône-et-Loire. Musée du Louvre.
☞ Le chemin de foi et de doute de Pierre.
Simon Bar-Jonas galiléen pêcheur sur le lac de Tibériade, est originaire, avec son frère André et Philippe de Bethsaïde. Il se marie et s’installe sur les rives du lac, dans la maison de sa belle-famille. A la demande de Jésus, il décide de quitter son foyer, tout comme son frère André, pour le suivre.
Bien que son vrai nom soit Simon, il fut surnommé Simon Kephas (« le roc ») par Jésus, ou encore Pierre. C’est d’ailleurs sous cette dénomination qu’il est le plus connu.
Simon Pierre est décrit comme un personnage au caractère enthousiaste, solide, énergique, impulsif mais parfois hésitant et faillible.
Pierre est toujours cité en tête de la liste des « douze ». Au commencement est l’évidence de l’appel, et tout paraît simple. Jésus appelle Simon, pour qu’il soit "pécheur d’hommes" (Matthieu 4,18) ; il se lève et le suit. La confiance de Jésus se manifeste par le don d’un nom nouveau : Simon devient Pierre, celui sur lequel on peut s’appuyer, sur lequel on peut construire. C’est l’époque des guérisons et des exorcismes, où tout semble possible.
La foi de Pierre en Jésus lui permet même de marcher sur les eaux. Pourtant, déjà dans cet épisode si riche de foi, le doute est là.
Eglise Saint-Nicolas de Civray, Vienne.
Des barques sur un lac et Jésus marchant sur les flots.
Lorsque Pierre voit Jésus marcher sur la mer il lui demande: « Seigneur, si c’est bien toi, ordonne-moi de venir vers toi sur les eaux. » Jésus consent. Pierre marche sur l'eau, mais effrayé, par la force du vent, il commence à couler et crie « Seigneur, sauve-moi ! ». « Aussitôt, Jésus étendit la main, le saisit et lui dit : « Homme de peu de foi, pourquoi as-tu douté ? ». Tant que Jésus est là, que ses ordres sont clairs, tout semble possible à celui qui croit. Mais s’il venait à partir ?
D'une façon générale, Pierre manifeste un désir de suivre Jésus partout, mais il est rattrapé par la faiblesse humaine.
Il est également présent lors de plusieurs miracles et évènements majeurs dans la vie de Jésus tels le lavement des pieds, la Transfiguration, mais aussi lors de son arrestation, de son procès et de sa crucifixion.
Quand Jésus annonce sa Passion, c'est un choc pour lui, et il ira jusqu'au reniement par trois fois du Maître prétendant ne pas faire partie de ses disciples lorsque le grand prêtre l’interroge. Peut-être lui fallait-il en passer par là pour devenir finalement un vrai témoin de Dieu, à la foi épurée par l'épreuve.
Ce chemin de foi et de doute amène Simon-Pierre jusqu’à sa propre passion.
Ces derniers moments de faiblesse contribuent à rendre humain la figure du gardien des clefs du Royaume des Cieux.
Le pape Benoit XVI dira ainsi, lors d'une homélie de remise de pallium, que dans le ministère de Pierre, " se révèle, d'une part, la faiblesse propre à l'homme, mais également la force de Dieu: c'est précisément dans la faiblesse des hommes que le Seigneur manifeste sa force; il démontre que c'est Lui-même qui construit son Eglise, à travers les hommes faibles".
Après la résurrection du Seigneur, à l'annonce par Marie Madeleine que le tombeau de Jésus avait été trouvé vide, Pierre fut le premier à y entrer, le "disciple bien-aimé" qui avait couru plus rapidement lui ayant laissé la préséance.
☞ Les attributs de Pierre
Quelle est l'origine du symbole des clefs ?
Dans l'Evangile de saint Matthieu, Pierre reconnait Jésus comme Messie et Fils de Dieu. Sur cette base une tâche spécifique lui est confiée à travers trois images: celle du roc qui devient pierre de fondation ou pierre angulaire, celle des clés et celle de lier et de délier.
La clef représente l’autorité sur la maison de David. L'attribut renvoie à l’oracle du prophète Isaïe sur le fonctionnaire Eliakim, dont il est dit : « Je mettrai sur son épaule la clef de la maison de David : s’il ouvre, personne ne fermera ; s’il ferme, personne n’ouvrira » (Is 22, 22).
Et dans l’Évangile, il y a une autre parole de Jésus adressée aux scribes et aux pharisiens, auxquels le Seigneur reproche de fermer aux hommes le Royaume des Cieux. Ces propos également nous aident à comprendre la promesse faite à Pierre : c’est à lui, en tant que fidèle administrateur du message du Christ, qu’il revient d’ouvrir la porte du Royaume des Cieux, et de juger s’il faut accueillir ou rejeter.
Simon-Pierre manifeste sa foi au nom de tous les disciples : « Jésus leur demanda : « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? » Alors Simon-Pierre prit la parole et dit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ! ». Jésus lui déclare alors solennellement : « Et moi, je te le déclare : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ; et la puissance de la Mort ne l’emportera pas sur elle. Je te donnerai les clés du royaume des Cieux : tout ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans les cieux, et tout ce que tu auras délié sur la terre sera délié dans les cieux. ».
L'image des clefs et l'expression " lier et délier " expriment des significations semblables et se renforcent l’une l’autre. L’expression fait allusion, d’un côté, aux décisions doctrinales et, de l’autre, au pouvoir disciplinaire, c’est-à-dire à la faculté d’infliger et de lever l’excommunication.
D'autre part, le parallélisme « sur terre … dans les cieux » garantit que les décisions de Pierre dans l’exercice de sa fonction ecclésiale présentent de la même façon une valeur devant Dieu.
Un chapiteau évoque le Christ dans une mandorle remettant les clefs à Pierre.
Eglise Notre-Dame de Gargilesse, Indre.
Un bas-relief montre le Christ bénissant de la main droite et remettant,
de la main gauche, les clés du Royaume à l'apôtre Pierre portant une crosse épiscopale.
Eglise de Chail, Deux-Sèvres.
Le Christ remet les clefs à saint Pierre ; le geste est associé à un symbole d’évangéliste.
Chapiteau déposé provenant de l'ancien cloître de l’abbaye de Saint-Pons-de-Thomières, Hérault. Musée du Louvre.
☞ Pluralité et diversité des représentations de l'homme aux clés.
Multiples sont les évocations de l'apôtre aux clefs tant d'un côté des Pyrénées que de l'autre. Les artistes, avec plus ou moins de talent, ont représenté l'apôtre aux clefs aussi bien sur les façades, tympans, chapiteaux de cloîtres que sur des peintures murales.
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Saint-Pierre tenant sa clef.
Façade de Notre-Dame-la-Grande, Poitiers, Vienne
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Saint Pierre avec ses clefs, fut le premier à confesser sa foi.
Ancienne église abbatiale Saint-Jouin-de-Marnes, Deux-Sèvres.
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Saint Pierre. tenant livre et clé.
Cathédrale d'Angoulême, Charente.
Variante.
Eglise de Chateauneuf, Charente.
Bien que le personnage ait perdu sa tête saint Pierre est reconnaissable à sa clef.
Eglise Saint-André, Ruffec, Charente.
Belle figure de saint Pierre sous une arcature portant gravé le nom de l'apôtre
Abbaye Saint-Pierre de Moissac, Tarn-et-Garonne.
La figure de l'apôtre se trouve sur le mur extérieur.
Montmajour : Notre-Dame, Chapelle Ste Croix, Bouches-du-Rhône.
Relief extérieur.
Collégiale Chauvigny, Vienne.
La Vierge avance les mains jointes vers le Seigneur. en compagnie de saint Pierre tenant les clés du paradis.
Détail du tympan de l'abbaye Sainte-Foy de Conques, Aveyron.
Les apôtres pieds nus accompagnent le Christ figuré plus haut au centre de l'archivolte. Le personnage portant la croix fait penser de prime abord à l'apôtre André mais il pourrait s'agir du prophète Jérémie de par le bonnet juif dont sa tête est couverte.
Pendant que Moïse porte la verge et les Tables de la Loi Pierre est comme toujours représenté avec ses clefs. Les yeux globuleux dont la pupille est percée au trépan peuvent être remarqués.
Claveaux de la voussure extérieure du portail de l'église Saint-Hilaire de Foussais, Vendée.
Le relief du tympan relatant la légende du diacre Théophile est encadré par deux saints personnages. Statue symétrique à droite du portail du narthex : saint Pierre ?
Ancienne abbatiale Sainte-Marie de Souillac, Lot.
Détail d'une fresque : l'artiste a même fait figurer le nom de l'apôtre représenté : SCS PETRUS.
Notre-Dame de Vals, Ariège.
Saint Jean l'Evangéliste et saint Pierre.
Jean tient dans sa main droite son Evangile avec les premiers mots: IN PRINCIPIO ERAT VERBVM, "Au commencement était le Verbe".
Pierre porte un étrange et complexe vêtement sacerdotal.
Abbatiale Saint-Gilles-du-Gard, Gard.
Variante de saint-Pierre.
Façade de Saint-Trophime d'Arles, Bouches-du-Rhône.
Saint Pierre, à côté du bas-relief de la Résurrection.
Arles, Saint-Trophime : le cloître.
De chaque côté du tympan de la basilique Saint-Sernin de Toulouse on note la présence de deux hauts-reliefs : ici, à droite, est figuré saint Pierre. Sur ce plan rapproché les clefs de Pierre apparaissent bien à sa ceinture.
Sous les pieds de l'apôtre on remarque la présence d'une composition évoquant Simon le Magicien accompagné par deux démons.
La fenêtre axiale de la façade est un des éléments les plus remarquables de cette église. A droite, le piédroit est constitué d'un relief monolithe représentant saint Pierre. Il s'agit d'un haut-relief engagé, taillé en réserve sur un fond plat. Au-dessus de l'auréole, le nom est gravé sur la bordure: S(AN)C(TV)S PETRVS.
A gauche, une statue colonne présente sainte Colombe en position d'orante.
Eglise de Sainte-Colombe, Charente.
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.Saint Pierre fait partie d'un ensemble de peintures murales du XIIIe siècle longtemps dissimulées qui peuvent depuis 2017 être à nouveau observées.
Cathédrale Saint-Pierre, Poitiers, Vienne.
Les voussures des arcs reposent sur des colonnes distribuées de chaque côté des portails, celle du milieu étant commune.
Cette dernière et les deux colonnes extrêmes en marbre sont ornées sur trois étages de personnages inscrits sous des arcades.
Une des colonnes de marbre figurant les apôtres parmi lesquels se reconnaît comme toujours l'homme aux clefs.
Cathédrale Saints-Jacques de Compostelle, Galice, Espagne.
Chapiteau de gauche : Christ crucifié, ange, et un motif floral. A droite : deux apôtres ; l'un d'eux porte un livre, le second pourrait être saint Pierre jouxtant une petite porte évoquant de façon originale le sépulcre du Seigneur.
Eglise San Vicente de Larumbe, Navarre.
Parmi un groupe se saints représentés à gauche du portail l'on reconnaît à nouveau saint Pierre avec sa clef.
Eglise de San Miguel, Estella, Navarre, Espagne.
Le tympan : Le Christ ayant la Vierge et saint Pierre à sa droite et saint Jean à sa gauche.( A l'origine il y avait sept personnages ).
Abbaye San Salvador, Leyre, Navarre.
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Au-dessus du tympan prennent place deux galeries. Elles sont constituées d'arcs en plein cintre supportés par des colonnes et chapiteaux doubles : y prennent place les apôtres dont saint Pierre.
Eglise Santa Maria La Real, Sangüesa, Navarre.
La voussure intérieure dans sa partie droite comporte un personnage assis qui peut être identifié à saint Pierre bénissant et tenant ses clés de la main gauche.
Portail occidental Eglise Santiago, Gustey, Galice, Espagne.
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