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Des formes des temps romans
aux programmes iconographiques gothiques
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Pour qui s’intéresse fondamentalement à l'architecture des X-XIIe siècles il peut paraître étonnant de se mettre à distance de l'espace spirituel roman en présentant le niveau inférieur de la façade de Notre-Dame de Paris.
Bien que nous sortions effectivement des limites de notre période d’étude habituelle, en ne se contentant pas d'observer le seul remploi roman qu'est le portail Sainte Anne, l'iconographie des autres portails permettra de mettre en avant certaines nouveautés spécifiques à l'art gothique. 


Depuis le dernier étage de l'Institut du Monde Arabe perspective sur Notre-Dame située dans l'île de la Cité au milieu de la Seine qui lui sert d'écrin .


  Du XIIe au XIVe siècle, une cathédrale en chantier

* Une église avait été bâtie au IVe siècle, qui fût remplacée au cours du VIe siècle par une construction plus grande. C'est ainsi durant l'épiscopat de Germain (558-576) et peut-être à l'initiative du roi Childebert Ier (511-558) que fut édifiée la cathédrale primitive, dédiée à Saint-Etienne.


* En 1160, l'évêque de Paris Maurice de Sully lance le projet de reconstruire une nouvelle cathédrale à l’est de l’ancienne, afin de libérer une importante surface pour former un immense parvis. 
La première pierre de Notre Dame, fut posée en 1163 par le pape Alexandre III mais il faudra près de deux siècles la cathédrale acquière son aspect définitif.
- De 1163 à 1190 : le premier édifice fût élevé.

- De 1200 à 1250 se déroule la deuxième phase des travaux avec la façade et les trois portails à l'Ouest. La tour Sud étant terminée en 1240 et la tour Nord en 1244.
- Vers 1260-1320  les rosaces furent construites, mais il faut attendre les années 1350 pour que le chantier prenne fin.
En 1844, c'est à Viollet-le-Duc qu'est confié le chantier de restauration des sculptures de Notre-Dame. L’entreprise dura plus de 20 ans, et fut effectuée dans un profond respect de l’œuvre originelle, en s’appuyant sur les connaissances historiques et les publications anciennes. Les œuvres primitives mutilées furent alors remplacées par de belles copies. 


Façade occidentale de la cathédrale .

La façade occidentale de la cathédrale Notre-Dame s'organise suivant cinq niveaux d'élévation, du bas vers le haut :
Le registre inférieur : les trois portails brisés à voussures
Le second étage : la Galerie des Rois
Le troisième niveau : la rosace qui rehausse la Galerie des Rois est à différencier des oculi de l'époque romane. 
Les quatrième et cinquième étages : la grande Galerie et les tours.


Les trois tympans de la façade occidentale surmontés de la galerie des rois.

Les vingt-huit statues de la galerie des rois représentent vingt-huit générations de personnages royaux de Juda. Erigés au XIIIe siècle au-dessus des trois portails ces figurations ne sont pas d'origine. Enlevées et jetées à terre sous la Révolution car on y voyait l'effigie des rois de France, elles ont été sauvegardées et sont exposées au musée de Cluny. 

A l’étage inférieur, sous la galerie des rois, on observe trois portails monumentaux bâtis à des époques différentes. Le remploi roman qu'est le portail Sainte-Anne (à droite ou au Sud), le portail central appelé portail du Jugement Dernier, plus élevé et plus large que les deux autres, et le portail de la Vierge ( à gauche ou au Nord ).
Ces
portails sont décorés d’une multitude de personnages et entourés dans les ébrasements de grandes statues refaites au XIXème siècle par Viollet-le-Duc.
Entre chaque portail s'insèrent quatre contreforts pourvus de niches comportant quatre statues refaites par l’atelier de Viollet-le-Duc. Il s’agit sur le contrefort gauche (Nord) du diacre saint Étienne, premier martyr de la chrétienté, sur le contrefort droit (Sud) d’un évêque, très vraisemblablement saint Denis, qui a apporté le christianisme à Paris et de part et d’autre du portail central de deux allégories, la Synagogue à droite, symbolisant l'Ancienne Loi et l'ancien Testament et l’Église à gauche, symbolisant le Nouveau Testament.
Si les proportions et les sculptures façade Ouest font de la cathédrale un véritable chef-d’œuvre monumental il ne faut pas omettre pour autant les portails, certes plus tardifs, directement observables depuis la rue au Nord de l'édifice.

Retour sur le symbolisme de la porte comme lieu de passage.
Par leur situation à l'entrée même de l'édifice ecclésial les portails constituent des lieux de transition ; il n'est donc pas sans intérêt d' observer ces éléments architecturaux métamorphosés par la main de l'homme non sans avoir rappelé l'importance du portail comme seuil.

Qui franchit la porte comprend que son déplacement est délibéré et non marche automatique à l'image de l'agitation humaine. La porte constitue, dans un édifice, par définition un passage entre l'extérieur et l'intérieur, mais au-delà de cette évidence le franchissement de ce seuil est pourvu de significations symboliques.
Une porte dans la vie quotidienne a plusieurs fonctions.
Tout dans le franchissement de son seuil conduit celui qui s'apprête à passer le pas à un changement d'état ; elle marque tout à la fois la séparation et la communication entre deux espaces. Le christianisme lui a donné une signification d’autant plus forte que le Christ se définit lui-même comme " la porte des brebis ", que saint Pierre, investi du pouvoir des clefs, est le gardien de la porte du Paradis, et que la Vierge est appelée " Porte du ciel ". Lieu de transition, passage entre le monde profane et l'espace sacré, la porte fait pénétrer le fidèle dans la maison du Seigneur, le conduit sur la voie du Salut et semble faire directement écho à la parole du Christ transmise par l'évangile de Jean. La porte est le lieu du franchissement qui permet d’accéder à un autre espace, matériel et/ou symbolique.
Ces deux fonctions se retrouvent en Jésus-Christ. Il est l’intermédiaire entre le ciel et la terre, il est le seul, l’unique médiateur entre Dieu et les hommes (1 Tim.2 :5) ; il marque le passage des ténèbres du péché à la lumière du royaume de Dieu. Dans le livre II de ses Homélies sur Ezéchiel les I, III et VI Grégoire le Grand ( 540-604 ) a développé un symbolisme complexe de la porte qui peut constituer une préfiguration des portails sculptés de l'époque médiévale comme le montre Michel Maupoix (Art sacré, n° 28 ) : - en s'appuyant sur l'Evangile de Jean la porte c'est le Christ "porte des brebis"Le Christ a dit : « Moi, je suis la porte » (Jn 10, 7). - puis Grégoire le Grand lie les images symboliques de la voie, du chemin et celle de la porte. Le Christ est pour nous la porte et aussi le chemin qui mène à cette porte, qui est encore porte de l'Eglise et porte de la lumière, c'est-à-dire accès au salut.
Cette fonction édifiante de l'image est particulièrement nette et abondante sur les tympans, les voussures et les chapiteaux. On sait que Grégoire le Grand insiste sur le rôle pédagogique de l'imagerie. Cette dernière raconte l'Ancien Testament, met en scène le Christ et les saints, montre le combat du bien et du mal, sépare les élus des damnés.
Délimitant l'espace entre sacré et profane, la porte est un lieu d'accueil, de franchissement, mais aussi d'exclusion pour celui qui n'en passe pas le seuil.
Commanditaires et sculpteurs ont œuvré pour orner les portails et leur rendre une fonction symbolique et cultuelle. "A preuve, les rituels qui se déroulent devant ou sous le portail. Le décor ne peut se comprendre si l'on ignore ce qui s'y fait : lectures, chants, sermons, processions. A l'extérieur comme à l'intérieur de l'église, l'iconographie, la liturgie et la pastorale ont partie liée" rappelle
Michel Pastoureau ( 2014, p.13 ).
Les portails des édifices religieux sont les portes d'entrée dans le monde sacré pour se détacher du monde profane. S'il assure la transition entre le monde et le royaume de Dieu la dimension humaine du portail reste fondamentale ; perceptible à tous les regards, il entend créer un espace où les hommes vont à la rencontre d'un Dieu qui leur est proche et accessible, une forme d'introduction au lieu de culte. La beauté et la singularité des portails, portes ouvertes sur la maison de Dieu, en font de véritables manifestes d'art. Mais pour les plus beaux portails ce cadre si richement orné ne suffit pas toujours à lui seul. Il est là pour mettre en valeur un ensemble édifiant pour les fidèles. Sous cette apparence décorative, les artistes ont abordé de profonds sujets.
Le portail en tant que lieu de transition entre ici-bas et le monde d'en-haut accueille les croyants qui en franchissant son seuil vont à la rencontre du Seigneur. En ce sens ils constituent " une forme d'introduction au lieu de culte " (Anne-Claire Meffre, 2008, p.6 ).

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Par leur situation à l'entrée même de l'édifice ecclésial les portails constituent un lieu de transition ; il n'est donc pas sans intérêt d' observer ces éléments architecturaux métamorphosés par la main de l'homme.
Les portails de la façade Ouest et du côté Nord seront successivement présentés en commençant par le portail possédant un remploi roman pour finir par les portes les plus récentes :

  • 1° Le premier portail construit vers 1200 est consacré à sainte Anne, la mère de Marie.
  • 2° Le deuxième portail est celui de la Vierge. Il se trouve à gauche, ou au nord. Datant des années 1210-1220.
  • 3° Le dernier portail ajouté au centre de la façade dans les années 1220 est celui du Jugement Dernier.
  • 4° Les portails visibles depuis la rue côté Nord quant à eux datent des années 1250 et 1270 :
  • celui du Cloître et la porte dite Rouge.
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