II- Le cimetière, témoin de l'histoire communale
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Pendant des siècles, église et cimetière demeurèrent des lieux contigus, complémentaires et indissociables.

Le rapport entre les morts et les vivants se modifie durant tout le haut Moyen Âge. A partir du IXe siècle, rompant avec l’exclusion antique des défunts hors les murs de la cité, le Moyen Âge va faire cohabiter les vivants et les morts sous l’autorité de l’Eglise. Ce rapprochement est à relier au souci d’être enterré près du lieu où reposent les reliques d’un saint, afin de bénéficier de sa protection et de son intercession auprès du Très Haut.
L’espace cémétérial devient progressivement indissociable de l’église. Les morts étaient inhumés à la fois dans l’église, contre ses murs et alentour. Le terme le plus communément utilisé au Moyen Âge n’est pas cimetière mais aître. Le mot vient d’atrium qui désignait la cour intérieure des maisons romaines.
L’aître désigne une petite zone dont l’un des côtés coïncide avec le mur de l’église.
L’aître est entourée de charniers, à la fois galeries couvertes, chapelles funéraires et ossuaires. Aître et charnier sont les appellations les plus anciennes et les plus courantes évoquant le cimetière médiéval.

Une hiérarchisation de l’espace cémétérial tend à s’opérer : 1) l’église elle-même où seuls certains privilégiés -dignitaires ecclésiastiques, seigneurs et riches bourgeois - peuvent se faire inhumer ; 2) la partie de l’enclos la plus proche de l'église et 3 ) la plus éloignée pour les pauvres où l'on trouve des sépultures à même la terre et la fosse commune aux corps superposés.
Ce régime des sépultures entraînait une fréquente manipulation de cadavres, de chairs et d’ossements dans les églises au pavé mal joint et dans les aîtres.
Il est difficile à l’homme contemporain, selon notre sentiment d’aujourd’hui, de saisir les odeurs, les émanations, en un mot l’insalubrité occasionnées par ce remue-ménage.


Du constat d’insalubrité des cimetières à l’établissement de nouveaux règlements
Cette brève évocation du cimetière médiéval  était nécessaire pour saisir les nombreux projets de réforme aboutissant à la situation moderne des cimetières.
Dès le deuxième tiers du XVIIIe siècle l’état de chose séculaire de phénomènes observés dans les tombeaux ( bruits, émanations pestilentielles ) est à nouveau dénoncé, non plus comme des manifestations du diable mais des phénomènes naturels et néanmoins fâcheux auxquels il faut remédier.
L’idée finira par s’imposer que si l’on faisait « une fosse à chaque mort et ce dernier ne sentira plus rien ». Cet argument initial de salubrité et d’hygiène publiques revêtira par la suite une dimension de dignité et de piété.
Une « Déclaration du roi concernant les inhumations » sur la prise en compte hygiéniste des cimetières est édictée en 1776. La majorité des corps devrait être enterrée dans un cimetière nouveau aux portes de la ville. 
C'est le scandale de la grande fosse commune des Innocents à Paris à la fin de 1779 qui accélère la prise de conscience des autorités de police. La pestilence accompagnant des dizaines de mètres cubes d'ossements provenant de charniers…envahit les maisons et les rues qui se trouvent à proximité.
Les cimetières intra muros de Paris furent progressivement fermés. De nouveaux espaces d’inhumation furent mis en place dont le fameux Père Lachaise; ces cimetières seront très différents des anciens qui étaient en général des cours d’église.

Le décret du 12 juin 1804 (ou 23 prairial an XII), prit par Napoléon I er devait assurer, à quelques modifications près jusqu’à nos jours, la réglementation des cimetières et des funérailles.

- L’interdiction d’enterrer dans les églises et dans les villes est définitivement confirmée.
- Le décret pose ensuite le principe que les corps ne devront plus jamais être superposés mais toujours juxtaposés. Ce qui implique que les pauvres soient enterrés eux aussi les uns à côté des autres ( et non plus les uns au-dessus des autres ) dans une tranchée continue.
- Des lieux de sépulture pourront être acquis et des monuments pourront y être édifiés. C’est le principe de la concession perpétuelle puisqu’il s’agit d’une permission d’ailleurs soumise à des restrictions.
- La personnalisation du lieu de sépulture par l’érection d’un monument deviendra la règle. Les cimetières commencent à devenir les espaces de mémoire que nous connaissons aujourd’hui.

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La place aujourd'hui située devant l'église du bourg, à l'ouest, occupe l'emplacement de l'ancien cimetière qui se situait là jusqu'en 1873-1874.

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La « pierre des morts »; située sur le parvis de l’église cette dalle plate repose sur deux sobres pierres rectangulaires.
L’origine de cette appellation tient au fait que les porteurs y posaient les cercueils des défunts, avant d’entrer dans l’église

A
Buxerolles c’est bien après ce décret napoléonien que le cimetière fut transféré des abords de l’église à son emplacement actuel très à l’écart du bourg.
Une commission fut d’abord chargée le 4 juin 1871 d’examiner la question du déplacement pour raison d’insalubrité publique et d’exiguité.
Ce n’est qu’en août 1874 que les travaux d’aménagement du nouvel espace cémétérial furent achevés.


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Partie ancienne du cimetière résultant des procédures de transfert 1871-1874

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Au premier plan : le cimetière actuel

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