Balade nez en l'air
à la découverte des cheminées de toiture
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Epi de faîtage et trois sorties de toit différentes. Manoir de Clotet.
Après avoir porté notre regard sur les girouettes nous allons à nouveau nous promener le nez en l'air en regardant les toits à la découverte des cheminées extérieures, ici et là, sur des habitations anciennes mais aussi sur des maisons récentes.
Dans les villages, la cheminée à feu ouvert apparaît à partir du XIIe siècle. Tout en bas, dans la maison, l’âtre assure autrefois chaleur et cuisson des aliments. De ce feu ouvert, les fumées s’élèvent par un conduit d'évacuation débouchant sur le toit.
Souvent nommées « cheminées » ou « cheminées de toiture », les sorties de toit, terme exact, semblent a priori un sujet de peu d'intérêt pour nombre de personnes qui considèrent que, vu leur place sur les sommets des maisons, elles restent bien secondaires. Pourtant... le doute est possible.
Pour s'en rendre compte il suffit de lever le regard vers les hauteurs ; la diversité des formes, styles et dimensions de toutes les sorties de cheminées que l'on peut voir permet de penser qu'elles ne sont pas du tout aussi " insignifiantes " que cela. Du moins en fut-il ainsi pendant des siècles ; la sortie de toit, en tant que caractéristique extérieure de la maison, est affaire d'époque et de région.
Un détour préalable pas si anodin que cela vers des sorties de toit d'ailleurs...
Sans doute les sorties de cheminées de notre commune sont-elles souvent discrètes comparées aux imposantes cheminées du château de Chambord qui en comportent autant que de jours dans l'année dit-on couramment ou encore à celles des cuisines extraordinaires de l'ensemble monastique de Fontevraud.
Les architectes des châteaux de l’époque de la Renaissance renchérirent sur leurs devanciers dans la construction des conduits de cheminée ; ils les décorèrent souvent avec un luxe de moulures et de sculptures tel qu’un accessoire prenne à la limite plus d’importance qu’il ne convient, et perde ainsi son véritable caractère. au point de se demander ce que contiennent ces énormes piles de pierre couvertes d'orifices et de décors comme à Chambord.
Vue partielle des célèbres cheminées de Chambord. qui donnent son caractère exceptionnelle et reconnaissable à sa silhouette.
Détail de l'ornementation d'une cheminée avec notamment la fameuse salamandre royale.
A l'ensemble abbatial de Fontevraud, il ne s'agit pas d'une cheminée unique, mais d'un système d'évacuation des fumées des cuisines monastiques reposant sur le principe de la cheminée sarrasine - un feu au milieu d'une pièce, une ouverture dans le toit- avec plusieurs puits d'évacuation disposés autour d'une pièce centrale flanquée de huit absidioles servant de foyers secondaires. Il semble même que ces absidioles n'étaient alimentées en bois que les jours où le tirage était favorable selon l'orientation des vents. Sur le toit, des clochetons couvrent les souches de cheminées, pour éviter l'entrée de la pluie et de la neige. ( Nous y reviendrons plus loin ).
Lors de la restauration du début du XXe siècle des lanternons ont été ajoutés à chaque cheminée.
Comme les petites cheminées la flèche centrale dispose d'un trou pour faciliter le tirage. Ainsi se présentent les surprenantes cuisines romanes à la toiture en écailles ( comme dans le Poitou voisin ).
Cheminées des cuisines monastiques de Fontevraud.
Quelles soient uniques ou plurielles comme dans les bâtiments de grandes dimensions les cheminées donnent aux toitures une allure singulière. Historiquement il se dessine une réelle caractéristique architecturale régionale des sorties de toit, très visible notamment dans les villages et maisons anciennes : la forme trapue des cheminées en pierre volcanique s’oppose aux formes élancées ou carrées des cheminées de briques ou des souches surmontées de mitrons de terre cuite selon les divers espaces régionaux.
Modeste ou spectaculaire, une sortie de toit peut être belle et donner du caractère à une demeure du moins en était-il ainsi ; la vente par catalogue a bouleversé les choses. Avec la standardisation actuelle elle perd, il est vrai, le caractère régional qui faisait son charme.
Un peu de technique
Avant d'entrer dans notre reportage photographique, il n'est pas inutile de rappeler sommairement quelques notions relatives aux sorties de toit ou "souches" de cheminées sur les toitures.
Du latin caminus, la cheminée désigne un conduit vertical dont la fonction est de débarrasser une zone intérieure des fumées et des gaz émis par un feu. Le terme désigne l'âtre qui siège au sein de l'habitation et la souche, partie du conduit dépassant du toit,. La souche assure la régularité du tirage.
Une cheminée est un âtre ou un foyer intérieur, un lieu de feu ouvert ou un fourneau en partie fermé qui communique avec un conduit vertical, très souvent adossé à un mur ou à plusieurs parois, aménagé dans un bâtiment en dur et souvent visible de l'extérieur en partie supérieure.
Par extension, elle désigne encore plus souvent ce conduit construit en dur qui véhicule et confine les fumées, les autres gaz de combustion éventuellement toxiques d'un quelconque foyer, ouvert ou fermé, brûlant, afin de les évacuer.
La sortie de cheminée correspond à la partie extérieure du conduit de fumée visible sur le toit. Très importante pour l'efficacité du tirage, la sortie de toit remplit différentes fonctions : d'une part, l'évacuation rapide et complète des fumées, de l'autre, la protection du conduit de la pénétration des eaux de pluie ou de la neige.
La sortie de toit est également un élément d'architecture qui finit esthétiquement le conduit de fumée en toiture en s'accordant - peut-on penser - au design de la maison, des styles traditionnels aux plus contemporains.
Conformément à la réglementation, pour éviter tout risque de chute, la souche doit être aménagée sur la pente « dépressionnaire », c’est-à-dire hors d’atteinte du vent dominant, mais assez près du faîte du toit. Elle doit dépasser d’au moins 40 cm le faîtage du toit et être distante de 8 m de tout arbre ou tout autre construction. de façon à favoriser au maximum l'évacuation des fumées.
La bonne évacuation des fumées ne doit pas déboucher dans une zone en surpression.
Une des plus anciennes cheminées ? Rue Hippolyte Véron.
Les souches de cheminées ne sont pas toujours évidentes à voir, surtout si, déambulant dans les rues, on est plus attentif à ce qu'il se passe à notre hauteur qu'au niveau des toits. On ne les trouve pas uniquement coiffant de vieilles toitures moussues, mais
se détachant sur les silhouettes de certains manoirs, de maisons bourgeoises et, plus simplement, de certaines constructions isolées.
De sections - rectangulaire, carrée ou ronde - et de matériaux différents - pierre, brique, terre cuite… - les sorties de toit de notre commune, bien qu'elles ne soient pas aussi typées que dans certaines régions, se révèlent tout de même d’une certaine diversité.
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