Un site sur la femme aux temps romans peut surprendre à plus d'un titre. La femme à l’époque romane est assez mal connue et les renseignements dont on dispose concernent principalement les moniales et les dames nobles.
Ce sont le plus souvent des hommes, et particulièrement des clercs invités à se méfier des femmes, qui parlent de la moitié féminine de l'humanité. Dans la société féodale des XI et XIIe siècles, dominée par les hommes, la femme apparaît comme un être subordonné. Mais ce sont des femmes au pluriel dont il serait plus juste de parler car leur situation n'est pas la même selon qu'elles sont religieuses, paysannes, femmes d'artisans ou de l'aristocratie.
Certaines fortes personnalités féminines ont joué toutefois un rôle important dans l'histoire du XIIe siècle comme Aliénor d'Aquitaine, comtesse de Poitou, et duchesse d'Aquitaine reine de France de 1137 à 1152, puis reine d’Angleterre à partir de 1154, elle participe activement à la vie politique des deux royaumes. Ou encore cette autre femme de caractère que fut Isabelle d'Angoulême née vers 1188, reine consort d'Angleterre après avoir épousé le roi Jean Sans Terre et morte en 1246, inhumée à l'ensemble monastique de Fontevraud. .
Modillon, église Saint-Hilaire, Mouthiers-sur-Boëme, Charente.
D'une façon générale le discours des hommes d'Eglise à l'encontre de la femme est souvent négatif ; les filles d'Ève sont fréquemment désignées comme tentatrices, corruptrices ; on considérait qu'elles incitaient les hommes au péché et ces derniers devaient s'en méfier…
Ce sombre portrait est nuancé par Marie, la mère du Fils de Dieu, et les vies exemplaires des saintes.
Ainsi les images de la femme personnifient le mal ou le bien traduisant le caractère ambivalent de l'image féminine dans les propos des clercs de l'époque.
Façade de l'église Saint-Nicolas, Civray, Vienne.
Plan rapproché de la Vierge du vitrail de la Crucifixion, cathédrale Saint-Pierre et Saint-Paul, Poitiers, Vienne.
Essentiellement mise en scène pour évoquer des passages des Saintes Ecritures, l'image de la femme peut être aussi perçue par de plus rares représentations sculptées ou peintes donnant quelques indications sur la vie quotidienne : coiffure, tenue vestimentaire, activités laborieuses, élans du cœur et ébats des corps.
Enfin, des programmes iconographiques dogmatiques et moralisateurs peuvent révéler certains aspects de leur époque tout en remplissant une fonction ornementale.
Vierges sages et Vierges folles, église Saint-Pierre de la Tour, Aulnay-de-Saintonge, Charente-Maritime.
Le ciseau des sculpteurs médiévaux a façonné des types bien différents de femmes dans des cadres fort divers. De sa nature la plus pécheresse à la figure emblématique de la Vierge trône du Christ les femmes se dévoilent sous des figurations plurielles.
Les représentations féminines observées à l'âge roman se rapportent d'abord aux Saintes Ecritures et sont plus rarement liées à des évocations profanes. C'est pourquoi le détour par des évocations indirectes d'inspiration religieuse complèteront avantageusement les évocations directes puisées dans la vie quotidienne des populations.
La place accordée à la femme dans les images réalisées dans la pierre apparaît nettement moindre que celle dévolue à l'homme. Elle est sans commune mesure avec le rôle effectif de la moitié du ciel dans la vie économique des espaces tant ruraux qu'urbains.
Nous essaierons de présenter une évocation de la moitié du ciel à l'époque romane à l'aide d'images des femmes sculptées des édifices du Poitou * ( Vienne, Deux-Sèvres, Vendée ) et des Pays Charentais ( Charente et Charente-Maritime ).
* Sous l'Ancien Régime, le Poitou, province étendue et riche en monuments, couvrait à peu près ce qui a servi à constituer, lors de la Révolution française, les départements de la Vienne, des Deux-Sèvres et de la Vendée.
Le prestige attaché aux édifices majeurs majeurs du Haut-Poitou, fruits d'une exceptionnelle fertilité créative, a contribué à maintenir dans l'ombre nombre de réalisations romanes du Bas-Poitou.
Il ne s'agit pas tant ici de revenir sur la primauté d'une partie du Poitou sur l'autre. Il s'agit plutôt de ne pas oublier la place que tient la Vendée, avec ses traits spécifiques ( édifices partiellement romans, vestiges d'abbayes, sculptures, cryptes, fresques ) dans l'art roman composite de l'ancienne province du Poitou.